Sometimes it lasts in love but sometimes it hurts instead.

Le visage de Dean se tourna vers elle et elle ne put échapper un mouvement de recul en même temps qu’un hoquet de stupeur. Le noir régnait autour d’eux, elle se sentait comme étrangère à cet environnement. Des lumières rouges l’aveuglèrent alors qu’un bruit assourdissant se rapprochait. Elle entendit des cris, une centaine de cris. Le bruit assourdissant se rapprocha encore plus d’elle et elle put enfin distinguer un gros charriot. Sans savoir ce qu’il contenait. Elle distingua une ombre passer juste à côté et elle essaya de bouger mais ses membres refusaient de bouger. A vrai dire elle ne pouvait même pas voir si c’était elle, elle n’arrivait pas non plus à bouger la tête pour pouvoir regarder où elle voulait. Ses yeux étaient contrôlés par une force, ce n’était peut-être pas elle après tout ? Elle entendit un cri et quelqu’un se débattre. Puis tout s’enchaîna tellement vite. Le visage de Dean. Ses milliers de couteaux. Ce sang coulant sur le sol en flaque. Et ces cris incessants cris.

Elle se réveilla en sursaut dans le lit, dégoulinante de sueurs. Elle mit plusieurs secondes à recouvrir ses esprits et inspecta la chambre des yeux. Elle était seule, un léger rayon de soleil traversant le fin rideau réchauffait déjà sa peau. Elle ferma un instant les yeux, passa sa main sur son visage comme pour chasser ses mauvaises images et elle fit virevolter les couvertures avant de s’extirper hors du lit. Un cauchemar. Encore un. Quand elle était loin de lui, petit à petit ces cauchemars s’étaient atténués, elle ne rêvait plus de ses innombrables morts, de ses différentes chasses où il pouvait mourir d’un instant à l’autre. C’était un calvaire que de vivre avec ce doute, cette peur incessante qui vous bouffe de l’intérieur, cette trouille de le perdre à tout jamais. Puis quand Sam lui avait annoncé la mort de Dean, tout s’était réenclenché. Elle avait encore du mal à savoir tout ce que voulait dire ses cauchemars, mais ils se situaient toujours au même endroit. Cet endroit qu’elle ne connaissait pas.

Elle enroula une veste autour d’elle et descendit dans la cuisine. Elle fut surprise de n’avoir croisé personne ou de n’entendre aucune voix. Son regard se posa sur la pendule dans le salon et elle sut pourquoi. Il était encore tôt. Un bruit de vaisselle la fit sursauter et elle croisa la silhouette de Sam. Il sentit sa présence et se retourna vers elle, un fin sourire aux lèvres. Sourire qui s’éteignit doucement voyant l’air déconfit de la jeune femme. Il savait que quelque chose n’allait pas. A vrai dire, vu la situation depuis quelques jours, il ne pouvait dire que tout allait bien. Ils étaient autant perdus les uns comme les autres. Sam murmura un bonjour avant de déposer un baiser sur sa joue. Elle lui fit un léger sourire et déposa à son tour un baiser sur sa joue avant de se saisir d’une tasse, de la bouteille de lait et de s’asseoir sur une chaise. Sam la rejoignit, tasse de café en main et ils restèrent quelques secondes silencieux.

« Il n’est toujours pas revenu ? » Marie brisa le silence avec une légère pointe de gêne. C’était toujours aussi dur de faire comme si elle ne s’inquiétait pas, de donner un air détaché à ses paroles.

Sam secoua la tête et but une gorgée de son café. Marie acquiesça et plongea son regard sur la table devant elle. Depuis que Castiel avait lancé cette mini bombe, les choses étaient réellement tendues. Dean était parti sur une chasse alors qu’elle aurait tout fait pour qu’il reste à ses côtés. Elle avait peur qu’il fasse une connerie. Et puis ces flashs. Ces rêves. Elle devenait folle et elle avait besoin de lui.

« Ne t’en fais pas Marie, il sait ce qu’il fait. » Cru bon de rajouter Sam. Elle ne put remonter le regard vers lui et hocha simplement la tête. C’est bien ça qui l’inquiétait. Elle savait ce qu’il avait en tête. Elle le connaissait tellement. Bien qu’elle aurait préféré qu’il en soit autrement, elle n’arriverait jamais à le raisonner quand il s’agissait des chasses. Et surtout pas maintenant qu’elle était impliquée dans quelque chose qui était peut être vraiment important.

« Sam. J’ai ces rêves étranges. Je… » Elle secoua la tête. « Non oublie, c’est idiot. »

Elle ramena une jambe contre sa poitrine et l’encercla de son bras. Elle allait ramener son autre main quand Sam posa sa main sur la sienne. Elle releva le regard vers lui et pendant un instant ils restèrent silencieux. Elle savait qu’il ne lâcherait pas le morceau pour savoir ce qu’elle avait. Elle savait aussi qu’il la comprenait bien plus qu’avant. Parfois ça l’attristait qu’il la comprenne autant. Car souvent, il la comprenait mieux que Dean l’avait jamais comprise. Elle ne bougea pas sa main et respira une grande bouffée d’air avant de finalement baisser les barrières.

« Tu sais que tu peux compter sur moi Marie. Dis-moi ce qui te tracasse. »
« Je crois que j’ai toujours fais ce genre de rêve quand Dean partait en chasses. Ca me terrifiait tellement de le savoir entre la vie et la mort… »
« Quels genres de rêves ? »
« Je fais toujours ces même rêves étranges où je ne peux pas bouger, on dirait que ce n’est pas mes rêves, enfin je veux dire, c’est pas comme les rêves habituels, et puis je suis toujours dans cette salle obscure, avec ces flashs rouges, et ces cris et… »

Elle déglutit avec peine et baissa un instant le regard avant de le reporter sur Sam.

« Dean. »

Il resserra sa main. Elle se faisait beaucoup trop de soucis.

« J’ai eu Dean au téléphone Marie, il va bien. Il faut que tu arrêtes d’angoisser pour lui. »

« C’est plus que de l’angoisse Sam, je sais pas… »

« Dean. Tu veux m’expliquer ce qui s’est passé. »
« Je ne vois pas vraiment de quoi tu parles… »
« Tu te fous de ma gueule ? Je te connais gamin. Tu as déjà fais des conneries dans ta vie, mais tu rates rarement un tir. Surtout un comme celui là. Alors je peux comprendre qu’avec Ma… »
« Ca n’a rien à voir avec elle. »
« Alors quoi ? Quoi ? » Dean poussa un soupir et ses poings se serrèrent sur le volant de la voiture jusqu’à ce que ses articulations deviennent blanches. Alors quoi ? Comment était-il censé expliquer quelque chose qu’il ne comprenait pas lui-même ? Sur lequel il n’avait pas de contrôle ? Il ne savait même pas par où commencer. Les cauchemars ? Les visions ? Ces rêves éveillés si tangibles qu’il le secouait jusqu’au tréfonds de son âme ? Ce qu’il avait fait ? Ce qu’il restait de lui ? Comment expliquer tout ça sans que le regard de Bobby change sur lui. Et celui des autres ? Marie… Douce Marie… Pourquoi l’avait-il embarquée dans tout ça ? Il savait pourtant que sa vie ne pouvait qu’être solitaire, il avait vu le désastre provoqué par l’espoir chez bien des chasseurs. Aucun n’avait réussit à la fois à sauver des vies et à s’en construire une. Ce qui nourrissait un chasseur, c’était de savoir que grâce à lui, d’autres personnes avaient cette chance.
« Bobby… »

Le vieil homme avait écouté avec patience, à la fois horrifié et ému par les confessions qui lui étaient faites. Ce gosse à ses côtés était ce qu’il avait de plus précieux au monde. C’était comme s’il avait été le sien. Il avait d’avantage était un père que John ne l’aurait jamais été. Il avait vu les deux frères Winchester grandir, devenir des hommes de bien. Il avait conscience qu’ils étaient loin d’être parfaits, mais ils avaient le cœur pu, avait mit leur vie au service des autres. Bobby croyait qu’ils avaient le droit au bonheur. Il aurait donné sa vie pour revoir un sourire sur leurs visages.





Dean s’extirpa du véhicule et s’étira longuement, les muscles endoloris par les kilomètres qu’ils avaient avalés, la conscience un peu confuse de se retrouver soudain debout. Il avait la gorge sèche, et aurait bien voulu avoir la chance d’atterrir dans un de ces hôtels à lit vibrant, gadget un peu glauque mais qui avait le mérite de dénouer ses muscles. Quoi que l’on puisse dire, le corps ne s’habituait jamais vraiment à ce qu’on lui infligeait et les années sur la route n’avaient pas rendu les voyages plus agréables. Ils avaient seulement laissé place à une routine salvatrice. Dean monta les escaliers en premier, suivit par Bobby qui une fois passé le seuil de la cuisine disparut aussitôt. Rien d’étonnant à cela, Ellen dormait dans sa chambre, « leur » chambre, et le premier de ses gestes maintenant était d’aller la rassurer. Et Ellen avait beau jouer l’indifférente, son cœur manquait un battement chaque fois qu’il franchissait le seuil de la porte.

Le regard de Dean lui se posa immédiatement sur la main de Sam posée sur celle de Marie et un feu lui ravagea l’intérieur. Il n’avait pu manquer l’incroyable entente entre son frère et son ex petite amie et cela le rongeait. C’était même pire que ça. Il avait l’impression que Sam savait des choses que lui ignorait, qu’il comprenait d’avantage Marie et que cette dernière se sentait plus à l’aise avec lui. De là à dire qu’il les imaginait à forniquer dans les placards il n’y avait pas loin. L’idée le tenait même éveillé, le faisait boire, lui donnait des envies de meurtre.

« Vous voulez pas faire ça dans une chambre plutôt ? » Il prit une bière dans le frigo et claqua la porte, s’installant face à eux pour les observer avec un regard noir. Il ne pouvait plus supporter de voir Marie chaque jour et de ne pouvoir être à ses côtés. Mais il devait tenir, uniquement pour elle. Il se foutait de ce que ce foutu truc ailé racontait, elle n’était pas faite pour cette vie. Elle méritait mieux, milles fois mieux. Elle serait une mère formidable. Une infirmière douée. Et non pas une personne qui aurait peur de ce qui pourrait se cacher dans le noir.

Les yeux de Sam l’incitèrent à continuer pourtant elle se tut. Elle avait l’impression de devenir folle, de ne savoir où était le bien du mal, la vérité du rêve. Les paroles de Castiel prenaient de plus en plus d’importance et elle avait du mal à en dormir. S’ajoutaient à cela des visions et des doutes concernant le futur, elle en devenait folle, se lever chaque nuit en sueur, cherchait à tâtons sa main et se rendait finalement compte qu’elle était seule, dans cette chambre, dans cette situation. Elle passait la plupart de sa nuit à regarder l’horizon par sa fenêtre, scrutant le moindre mouvement, cherchant du regard le moindre changement. Parfois même, elle se surprenait à sentir deux mains se poser sur ses épaules, deux bras puissants entourer son corps frêle, jusqu’à ce qu’elle réouvre les yeux, se retourne et se rende compte qu’il n’était plus là à présent. Il n’était là que dans ses souvenirs.

Elle était perdue dans ses pensées quand Dean entra dans la cuisine. Un frisson parcourut son dos quand il leur fit cette réflexion et elle retira sa main presque instantanément. Cela n’avait rien à voir avec Sam, c’était plutôt une réaction pour se protéger. Elle tourna la tête vers Dean et le regarda s’installer en face d’eux, les fusillant du regard. Pourquoi agissait-il ainsi alors qu’il la repoussait sans cesse ? Il était tellement idiot de penser qu’elle pouvait ressentir quoi que ce soit de plus que de l’amitié pour Sam. Il était comme son meilleur ami et son confident. Rien de plus. Il était un peu son Josh. Dean avait des raisons d’être jaloux de Josh autrefois, car il lui était étranger. Mais pourquoi était-il jaloux de son propre frère ?

« Arrête tu es ridicule. » Lâcha-t-elle alors qu’elle se leva finalement et posa sa tasse dans l’évier.

Jamais elle et Sam ne pourraient être plus que des amis, car ils ne ressentaient qu’une très grande amitié, un genre d’amour fraternel. Elle le considérait comme un membre à part entière de sa famille, comme si elle l’avait toujours connu. Mais en aucun cas elle ne le voyait comme un intérêt amoureux. Dean avait réduit tout espoir qu’elle puisse un jour refaire sa vie. Elle ne pouvait aimer autre homme.

Ses mains se crispèrent sur le plan de travail et elle se courba légèrement sous la douleur. Elle avait l’impression que sa tête allait exploser alors qu’un violent flash s’insinua dans son esprit. Les images défilèrent devant ses yeux sans qu’elle ne puisse les arrêter. Cela lui parut une éternité pourtant quelques secondes plus tard, elle reprenait déjà son souffle. Elle espérait que ça soit passé inaperçu par les deux hommes présents dans la pièce mais le silence qui avait régné dans la pièce après sa réflexion n’arrangeait rien. Elle ne se détourna pas vers eux et reprit sa respiration, essayant de chercher une réponse à ce qu’elle venait de voir. Avec précipitation elle ouvrit la porte du réfrigérateur et prit une bouteille d’eau avant de quitter la pièce sans un mot.

Elle se sentait toujours faible après une de ses « visions ». Et elle ne voulait pas qu’on la voit ainsi, elle ne voulait pas qu’ils se doutent que quelque chose ne tournaient pas rond chez elle. Elle voulait d’abord comprendre son état avant de faire part de ses doutes aux autres. A vrai dire, elle avait peur de la réaction de Dean, elle ne savait pas comment il réagirait en sachant ce qu’elle pouvait voir. Elle n’était même pas sûre de ce qu’elle voyait alors pourquoi inquiéter les autres sur quelque chose qui n’était peut-être que le fruit de son imagination ?

Elle monta les marches rapidement et se réfugia dans la chambre d’amis, sa chambre, et se laissa tomber sur le lit, la bouteille d’eau entre ses mains. L’obscurité de la chambre la rassura et elle baissa la tête en soupirant, les larmes aux bords des yeux. Elle ne savait pas ce qu’elle était et plus les jours passaient, plus elle en avait peur. Elle avait beau rester forte, elle n’en était pas moins vulnérable. Et Dean. Le savoir si près et pourtant ne pouvoir être proche de lui la tuait. Leur relation était tendue, elle n’avait même pas de mots pour décrire la situation dans laquelle ils étaient. Elle savait qu’il l’aimait toujours, leur étreinte cette nuit-là sur la voiture n’avait fait que lui confirmer, mais elle n’était sûre de rien à présent. Et elle ne savait comment arranger les choses entre eux. Il y avait tellement de choses non dites, tellement de mensonges et de blessures. Ils étaient tous les deux brisés. Sans se rendre compte qu’il ne manquait que la présence de l’autre pour être plus fort.